SOS pour "l’école de Macky Sall"
un laboratoire de l'institut |
Construit pendant la colonisation, le bâtiment qui abrite
l’école d'ingénierie de l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar est aujourd'hui
dans un état de délabrement avancé. Mal entretenu et insalubre, le bâtiment
prend de l’âge. Au grand dam de sa communauté, impuissante et résignée, mais
s’arme de patience en attendant la délocalisation de l’école à l'Unidak2, en
construction. Plein feu sur l’institut d'où a été formé l’actuel président
sénégalais
Institut des sciences de la terre (Ist), de loin, on croirait un ancien
bâtiment abandonné et laissé à l'état. Rien n’indique le lieu. La devanture est
très ombrageuse et arborisée. De gauche à droite, le panorama donne l'air d'un
dépotoir à ciel ouvert: papiers, tasses de cafés Touba, feuilles fanées,
jonchent le sol. Quelques bancs sont érigés, une guimbarde et un bus
poussiéreux donnent l’impression d’y être éternellement stationnés. La
seule chose qui indique qu’il s’agit d’une école d’ingénierie est une grosse
roche posée à la devanture. Un robinet public à gauche avec une étendue boueuse, tout près,
des bouilloires sont posées de façon désordonnée. Ici point d’espace vert ni
asphalte ni pavage ; l’espace est très sablonneux .Quelques étudiants
s'affairent à faire leur ablution. En ce jour particulier où le climat est
plutôt capricieux, il vente beaucoup, et comme tout vendredi, les vêtements
habituels sont troqués en faveur des vêtements traditionnels, communément
appelé "yere olof". Ist, il est 15h, temps ensoleillé, après la
prière de la mi-journée, les étudiants se précipitent pour regagner les amphis.
Ici, tout semble être sclérosé et vermoulu. En franchissant le seuil de la
porte d'entrée du bâtiment, qui abrite un musée ; en haut du portail, est
écrit sur une plaque rouillée "Museum géologique africain". Et y est marquée la date de l'inauguration du musée, le 06 mai 1963,
par le président Léopold Sédar Senghor. Tout près de là, un étudiant en
première année, document en main, semble indifférent à l'encombrement des
lieux, et surtout l'odeur âcre qui s’y dégage «l'école n'est vraiment pas aux
normes, nous interpelons l’Etat».
A l'intérieur du musée ; des trous çà et là, et sont établis tous azimuts
des pierres sur des stèles. La provenance des pierres est marquée par des
cartes de pays en marbre. On peut y voir au premier plan, la carte de la République de Guinée, à
quelques mètres de là, les cartes de Haute volta et Dahomey, référence aux
anciens noms du Burkina Faso et du Benin ; preuve de l’immobilisme. De
l’autre bout du musée, une Carte de
Dakar, avec les sites et la nature de sols. Des matériels de toutes sortes remplissent
le musée, des lampes sont allumées jour et nuit, et donne l'impression de ne
jamais s'éteindre. En arrière-plan, des nattes servant de prières pour les
étudiants sont étalées.
Sur le rez-de-chaussée, en longeant
le couloir à gauche, on traverse les différentes salles, toutes remplies,
certains étudiants sont assis à même le sol ; Les autres debout, semblent se
concentrés sur les explications du professeur. Ici, il règne un tumulte inouï. Les
murs crasseux, fenêtres rouillées, couloirs poussiéreux. Il s’y mêle une odeur
fétide, dégagée par les toilettes publiques du bâtiment. Un étudiant y traverse
en jetant un coup d'œil de dédain à
l'intérieur des toilettes, tout en se pinçant le nez «hum dégueulasse, quelle
puanteur!» peste-t-il. Dans une autre salle en face des toilettes, un professeur
semble mal à l'aise, à cause de l'odeur qui s'y dégage. Il profite d'un moment de répit pour sortir de
la salle. Bakary Manga, Professeur de Mathématiques, boubou traditionnel,
tête chenue, Sans ambages, montre sa gêne de travailler dans ces conditions.
«C’est inacceptable, personne ne peut travailler dans ces conditions, j’y viens
malgré moi, c’est vraiment honteux et indigne pour l’école qui a formé l’actuel
président sénégalais.»
Non loin de là, au premier étage, séparé par des longs escaliers poussiéreux.
L'odeur des toilettes y parvient ; des étudiants y sont massés, attendant,
visiblement pressés de faire leur cours. «Vous-même, vous constatez ces
conditions dans lesquelles nous évoluons, c'est terrible, mais on est obligé de
faire avec.»
Plus tard, à 18H, à la fin de la plupart des cours ; Le président de
l’amicale des étudiants de l'Ist, Mor Fall, se propose volontiers de montrer
les laboratoires. Ceux-ci sont très exigus et mal équipés ; des substances
remplissent des flacons. Ces laboratoires ont du mal à contenir tout ce monde qu’ils
reçoivent au quotidien et à résister aux temps depuis la construction ; mais
sembles plus propres et entretenus qu’ailleurs.
L’école manque aussi de
sonorisation, obligeant les professeurs à égosiller pour se faire entendre. «Je
suis obligé de crier pour me faire entendre, je rentre la voix nouée, mais
comment faire?» s'interroge-t-il. Au dernier étage, les couloirs sont plus
calmes, abritant les bureaux de professeurs de la Faculté des sciences et
techniques.
L'Ist est membre du Brgm (Bureau de recherche géologique et minier). Les
mêmes bâtiments qui jouxtent l’école sont délabrés, ils ont été construits pendant la colonisation,
ils ont été cédés au Sénégal qu’après l’indépendance. L’institut a même abrité
le ministère des mines dans les années soixante.
Le temps semble être suspendu dans ces lieux ; à la vétusté des lieux
et au manque d’entretien, s'ajoutent le manque d'eau. Cela justifie-t-il
l’insalubrité des toilettes? « Pourtant des femmes nettoient chaque jour» semble relativiser un professeur.
Selon l'administration de l'école, le Président Macky Sall a accepté leur
doléance, et une délocalisation est en vue, pour l'Unidak2 en construction à
Diamniadio. Selon elle, l’école des ingénieurs sera la première dans la
nouvelle université en périphérie de Dakar. En attendant, l’ère est à la
patience!
Selon un proche du directeur, très pessimiste « nous allons quitter ces
locaux, ce bâtiment ne répond plus aux normes. Deux ans, ce n'est pas
grand-chose, on s'arme de patience». Par contre, les étudiants, eux, piaffent
d'impatience pour quitter l'endroit, un vrai ouf de soulagement serait-il. En attendant les géologues se débrouillent
bon gré, mal gré. Le même bâtiment abrite le Cesti, à la différence de celle-ci,
qui est bien entretenue et propre, située de l’autre face du bâtiment, l'école
d'ingénierie enseigne les sciences de la terre, mais ne sait pas entretenir ses
locaux, drôle de paradoxe!
Barryologie info
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